Mixeurs de cryptos : rapport exclusif sur leur utilisation et leur contribution au blanchiment

Longtemps considérés comme des outils de confidentialité, les mixeurs de cryptos sont aussi dans le viseur des régulateurs pour leur rôle dans le blanchiment d’argent. Ce rapport explore leur fonctionnement, leur usage réel et les tensions qu’ils suscitent entre protection de la vie privée et lutte contre la criminalité financière.
Les transactions en cryptomonnaies sont souvent perçues comme anonymes. En réalité, elles sont pseudonymes : chaque transfert est enregistré sur la blockchain et peut être retracé via l’analyse des adresses de portefeuille. Sans outil dédié, les utilisateurs restent donc identifiables. C’est là qu’interviennent les mixeurs de cryptos, des services conçus pour renforcer la confidentialité des transactions en brouillant les pistes.
Le principe est simple : ces services mélangent les fonds déposés avec ceux d’autres utilisateurs, rendant plus difficile l’association entre une adresse d’envoi et une adresse de réception. Les mixeurs modernes opèrent généralement sous forme d’applications décentralisées (dApps) utilisant des smart contracts. Tornado Cash, par exemple, fonctionne sur Ethereum. Lorsqu’un utilisateur y dépose des fonds, un smart contract les stocke temporairement avant de les redistribuer à une nouvelle adresse, sans lien apparent avec l’adresse d’origine. Une preuve cryptographique, sous forme de « hash », permet au propriétaire de récupérer son argent.
D’autres solutions existent, comme CoinJoin, un système utilisé pour Bitcoin. Contrairement aux mixeurs basés sur des smart contracts, il repose sur le regroupement de transactions entre plusieurs participants pour rendre le traçage plus complexe.
Si ces outils sont prisés par ceux qui souhaitent préserver leur vie privée, ils suscitent aussi des inquiétudes. En raison de leur capacité à anonymiser les flux financiers, certains mixeurs ont été détournés pour du blanchiment d’argent ou d’autres activités illicites. Un débat qui oppose défenseurs de la confidentialité et régulateurs, déterminés à encadrer leur usage.
Une utilisation en baisse, mais qui reste soutenue
Après avoir atteint un pic historique en avril 2022 avec plus de 1,5 milliard de dollars de cryptos mixés, les services de mixage ont vu leur popularité décliner à mesure que le marché baissier s’installait. Mais selon Chainalysis, l’année 2024 marque un retour en force de ces outils, en phase avec la reprise globale du marché des cryptomonnaies.
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Si les volumes restent inférieurs aux niveaux records de 2021 et début 2022, la tendance est à la hausse. D’après un rapport publié en juillet 2024, Tornado Cash et Wasabi Wallet figurent parmi les mixeurs les plus dynamiques. À l’inverse, Samourai Wallet a cessé ses activités en avril 2024, tandis que Joinmarket a perdu de son attractivité au cours du deuxième trimestre.
Un signal fort qui témoigne d’un regain d’intérêt pour les solutions de confidentialité sur la blockchain, malgré la pression réglementaire croissante qui entoure ces services.
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Blanchiment et mixeurs : quels sont les faits ?
Tous les fonds transitant par les mixeurs ne sont pas liés à des activités illicites. En 2024, 9 % des flux issus d’adresses suspectes ont été mixés, selon Chainalysis. Pourtant, ces services restent prisés par des cybercriminels pour blanchir des fonds volés ou dissimuler des transactions douteuses.
Parmi les groupes les plus actifs, Lazarus, affilié à la Corée du Nord, a régulièrement eu recours aux mixeurs. Après le piratage du pont HECO de HTX en 2023, il aurait dissimulé plus de 100 millions de dollars via Tornado Cash. Un scénario similaire s’était produit en 2022, lorsque le groupe avait blanchi 455 millions de dollars issus du hack de Ronin Bridge, contribuant à l’inscription de Tornado Cash sur la liste des entités sanctionnées par les États-Unis.
Les mixeurs sont aussi utilisés dans d’autres types de cybercriminalité. Les ransomwares exploitent ces services pour anonymiser les paiements en Bitcoin extorqués à leurs victimes, tandis que les places de marché du darknet, comme Silk Road, Hydra et Alphabay, s’en sont longtemps servis pour effacer les traces de transactions liées à la vente de drogues, d’armes ou de faux documents.
La répression s’intensifie. En avril 2024, les autorités américaines ont fait fermer Samourai Wallet, accusé d’avoir facilité le blanchiment de 100 millions de dollars provenant de marchés du darknet. Par ailleurs, Chainalysis indique qu’environ 2 % des fonds transitant par des plateformes sans KYC et 1 % de ceux circulant dans la DeFi ont été mixés en 2024. Un chiffre modeste, mais qui alimente la surveillance accrue des régulateurs.
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D’après le rapport 2024 de Chainalysis sur la criminalité liée aux cryptomonnaies, 40,9 milliards de dollars ont circulé via des adresses associées à des activités illicites, soit 0,14 % du volume total des transactions en crypto.
Si 9 % de ces fonds sont passés par un mixeur, on estime qu’environ 4 milliards de dollars d’origine criminelle y ont transité sur l’année. Un chiffre conséquent, mais qui reste marginal par rapport à l’ensemble des flux en cryptomonnaies, confirmant que ces services ne sont pas exclusivement utilisés à des fins frauduleuses.
Les mixeurs les plus populaires
Tornado Cash
Lancé en 2019 par Roman Storm, Alexey Pertsev et Roman Semenov, Tornado Cash est une application décentralisée (dApp) fonctionnant comme un mixeur de cryptomonnaies sur la blockchain Ethereum. Compatible avec l’Ethereum Virtual Machine (EVM), il permet d’anonymiser des transactions sur Ethereum, Arbitrum, Optimism, Avalanche, Binance Smart Chain (BSC), Polygon et Gnosis Network.
Son fonctionnement repose sur la technologie des zk-SNARKs, qui permet aux utilisateurs de prouver la possession d’un élément sans en révéler les détails, garantissant un haut degré de confidentialité. Lorsqu’un utilisateur souhaite anonymiser ses fonds, il effectue un dépôt dans un smart contract, générant un hash cryptographique (« note »), qui servira ultérieurement pour le retrait. Pour éviter tout lien entre les adresses, il est recommandé de retirer les fonds vers un nouveau portefeuille ou d’utiliser un relayer, qui masque l’origine de la transaction en réglant les frais de gas en échange d’une commission.
Avant d’être sanctionné par les États-Unis en août 2022, Tornado Cash connaissait une adoption croissante. En avril 2022, il enregistrait 7 453 dépôts hebdomadaires, avec une valeur totale verrouillée (TVL) de 293 000 ETH, soit environ 1 milliard de dollars à l’époque. Le protocole générait alors 2,5 millions de dollars de frais mensuels, dont 94 % provenaient des transactions en ETH.
Mais son succès a attiré l’attention des autorités. Accusé d’avoir facilité le blanchiment d’argent pour des groupes criminels, notamment le Lazarus Group nord-coréen, le protocole a été placé sur la liste noire de l’OFAC (Office of Foreign Assets Control). L’impact a été immédiat : en une semaine, le nombre de retraits a chuté de 66 %, et les revenus mensuels sont passés de 1,28 million de dollars en janvier 2022 à seulement 109 000 dollars un an plus tard.
Malgré les sanctions et l’arrestation de ses fondateurs, Tornado Cash n’a jamais cessé de fonctionner, grâce à son modèle décentralisé. Début 2025, la TVL du protocole atteint 183 000 ETH, soit environ 485,6 millions de dollars, avec Ethereum représentant 89,3 % des fonds déposés. Le nombre total d’utilisateurs dépasse 98 000 déposants et 164 000 retraits depuis sa création.
Le protocole bénéficie d’un retour en force du marché des cryptos et d’une décision de justice américaine annulant les sanctions en janvier 2025, ce qui a provoqué une hausse de 225 % du prix du token de gouvernance, TORN.
Lancé en février 2021, le token de gouvernance TORN permet à ses détenteurs de voter sur les décisions du DAO Tornado Cash. Début 2025, il affiche une capitalisation de 46,2 millions de dollars et une Fully Diluted Valuation (FDV) de 121,2 millions de dollars.
Malgré les controverses et la surveillance accrue des régulateurs, Tornado Cash reste l’un des rares outils entièrement décentralisés garantissant l’anonymat des transactions en crypto. Son destin demeure incertain, mais son succès repose sur une demande croissante pour des solutions de confidentialité, à une époque où la traçabilité des transactions blockchain devient de plus en plus stricte.
WabiSabi (Wasabi Wallet)
Wasabi Wallet est un portefeuille Bitcoin non custodial axé sur la confidentialité qui utilise la technologie CoinJoin pour briser les liens visibles entre les transactions sur la blockchain. Cette technique permet de mélanger plusieurs transactions entre différents utilisateurs afin de masquer l’origine et la destination des fonds. Contrairement aux transactions classiques, qui sont enregistrées de manière transparente et traçable, CoinJoin regroupe plusieurs entrées et sorties en une seule transaction, rendant ainsi l’analyse blockchain bien plus complexe.
Historiquement, Wasabi Wallet s’appuyait sur un coordinateur unique, exploité par l’entreprise zkSNACKs, pour organiser ces sessions de mélange. Cependant, la situation a radicalement changé : zkSNACKs a cessé ses opérations à la suite de l’arrestation en 2024 des fondateurs de Samourai Wallet. Désormais, il n’existe plus de coordinateur par défaut, mais le protocole WabiSabi, sur lequel reposait l’ancienne version Wasabi Wallet, permet toujours de faire fonctionner des CoinJoin.
WabiSabi est un protocole open source, ce qui signifie que n’importe qui peut exploiter un coordinateur CoinJoin. Avec la disparition de zkSNACKs, plusieurs nouveaux coordinateurs ont vu le jour, opérés aussi bien par des anonymes que par des personnes connues de l’écosystème Bitcoin. Certains offrent leurs services gratuitement afin d’éviter d’éventuelles poursuites judiciaires, tandis que d’autres appliquent encore des frais pour financer leur infrastructure.
Toutefois, cette diversification des coordinateurs s’accompagne de nouveaux défis. Certains pourraient être malveillants, soit en étant exploités par des sociétés d’analyse blockchain cherchant à surveiller les transactions, soit en exploitant des failles dans le protocole pour siphonner les fonds des utilisateurs.
Malgré ces risques, la plupart des nouveaux coordinateurs offrent les mêmes garanties que celui de zkSNACKs, à une différence majeure près : la dispersion des utilisateurs entre plusieurs coordinateurs entraîne une fragmentation de la liquidité. Or, pour maximiser l’efficacité d’un CoinJoin et renforcer l’anonymisation des transactions, il est préférable que le plus grand nombre d’utilisateurs converge vers le même coordinateur.
Mixero
Mixero est un service de mixage de Bitcoin visant à renforcer la confidentialité des transactions en rendant leur traçabilité plus complexe. Contrairement à Wasabi Wallet, qui est un portefeuille Bitcoin intégrant la fonctionnalité CoinJoin pour anonymiser les transactions, Mixero se présente comme une plateforme distincte dédiée exclusivement au mélange de bitcoins.
Mixero propose plusieurs modes de mixage pour répondre aux besoins variés des utilisateurs :
Mode Basique : Ce mode utilise uniquement des transactions CoinJoin pour anonymiser les fonds.
Mode Avancé : Ce mode ajoute une couche supplémentaire de confidentialité en passant par un pont Monero (XMR), convertissant temporairement les BTC en XMR avant de les reconvertir en BTC.
Mode Ricochet : Ce mode augmente le nombre de cycles de CoinJoin, appelés “hoops”, et permet aux utilisateurs de définir un nombre aléatoire de ces cycles ainsi que des délais entre les transactions, rendant les transactions plus difficiles à tracer.
En comparaison, Wasabi Wallet utilisait principalement le protocole WabiSabi pour organiser des sessions de CoinJoin, sans offrir les modes avancés ou ricochet que propose Mixero.
Mixero fonctionne comme un service centralisé, où les utilisateurs envoient leurs bitcoins à la plateforme pour qu’ils soient mélangés et renvoyés à de nouvelles adresses. Ce modèle nécessite une confiance envers l’opérateur du service quant à la gestion sécurisée des fonds et la non-conservation des logs de transactions.
Les informations disponibles ne précisent pas l’identité des concepteurs de Mixero. Le modèle économique de Mixero repose sur des frais de service variables (de 0,7 à 4,7 %) en fonction du mode de mixage choisi.
Whir
Whir utilise le protocole CoinJoin pour regrouper plusieurs transactions en une seule, rendant ainsi plus difficile le traçage des fonds. Les utilisateurs peuvent spécifier jusqu’à trois adresses de réception pour répartir les bitcoins mélangés, et ont la possibilité d’introduire des délais allant jusqu’à 48 heures pour augmenter l’anonymat des transactions.
Whir est un service centralisé, ce qui signifie que les utilisateurs envoient leurs bitcoins à la plateforme pour qu’ils soient mélangés et renvoyés à de nouvelles adresses. Ce modèle nécessite une confiance envers l’opérateur du service quant à la gestion sécurisée des fonds et la non-conservation des journaux de transactions.
Les informations disponibles ne précisent pas l’identité des concepteurs de Whir. Le modèle économique de Whir repose sur des frais de service fixes de 3 %, auxquels s’ajoute une commission réseau de 0,001 BTC par transaction. Les utilisateurs peuvent choisir des délais de mixage allant de “Mix ASAP” (mélange immédiat) à des délais de 1 heure, 2 heures, jusqu’à 2 jours, en fonction de leurs besoins en matière de confidentialité. Whir limite le nombre de bitcoins pouvant être mélangés à une unité
La confidentialité des mixeurs crypto : un mythe technologique ?
L’idée selon laquelle les mixeurs de cryptomonnaies garantissent une confidentialité absolue est largement battue en brèche par les avancées des outils d’analyse blockchain. « Chainalysis dispose d'une grande expertise en matière de traçage des fonds, même lorsqu'ils passent par des mélangeurs », déclare à The Big Whale Matthias Bauer-Langgartner, en charge des affaires européennes pour Chainalysis. Autrement dit, bien que les mixeurs ajoutent une couche de complexité aux transactions, ils ne les rendent pas intraçables. Loin d’être des boîtes noires hermétiques, ces outils d’anonymisation laissent des traces exploitables, que des sociétés comme Chainalysis s’efforcent de décrypter.
Le cœur de cette capacité repose sur l’identification de « patterns » qui permettent de remonter à la source des fonds. Matthias Bauer-Langgartner affirme ainsi que Chainalysis peut « demix » des transactions, révélant ainsi l’origine des actifs crypto, et ce malgré les efforts déployés par les utilisateurs pour brouiller les pistes. Cette réalité remet en cause la promesse initiale des mixeurs : si leur utilité réside dans l’obfuscation des flux, leur efficacité face aux outils d’analyse avancés semble de plus en plus limitée.
Ce constat est d’autant plus important que l’utilisation des mixeurs ne se limite pas aux cybercriminels. Matthias Bauer-Langgartner reconnaît que ces services peuvent « aussi servir des objectifs légitimes, comme préserver un certain degré de confidentialité. » L’anonymat n’est donc pas systématiquement synonyme d’illégalité, mais la tension entre ces deux usages se reflète dans les évolutions réglementaires récentes.
La nouvelle réglementation européenne contre le blanchiment d’argent (disponible ici) s’inscrit dans cette dynamique de contrôle renforcé. Désormais, les entités soumises à cette régulation, notamment les fournisseurs de services sur actifs numériques (CASP) régulés par MiCA, ne pourront utiliser de mixeurs ou proposer des comptes anonymes.
Mais cette interdiction a-t-elle un réel impact ? La réponse demeure incertaine. En pratique, Matthias Bauer-Langgartner précise que « peu d’entités et de CASP européens proposent actuellement des services de mixage. » Autrement dit, cette mesure formelle pourrait ne pas bouleverser fondamentalement l’écosystème existant. Surtout, la réglementation européenne – et a fortiori la législation française en préparation – ne s’étend pas aux portefeuilles privés. Les utilisateurs individuels conservent donc la possibilité d’accéder aux mixeurs, y compris pour des usages illicites.
Dès lors, un bannissement général des mixeurs semble difficile à appliquer. Matthias Bauer-Langgartner met en avant un obstacle de taille : « Une interdiction générale des services de mixage serait très difficile à faire respecter, étant donné la nature souvent décentralisée de ces offres. » Cet argument souligne une limite fondamentale de la régulation : si les fournisseurs de services centralisés peuvent être contraints, les protocoles purement décentralisés échappent largement aux cadres juridiques traditionnels.
Face à cette complexité, la traçabilité des flux devient un enjeu stratégique pour les autorités et les acteurs du secteur. Matthias Bauer-Langgartner insiste sur « le rôle crucial de nos solutions de traçage pour aider les entreprises à évaluer et gérer les risques AML, et permettre aux forces de l’ordre de suivre efficacement les flux illicites. » L’approche ne se limite plus à une analyse a posteriori, mais tend désormais vers une prévention active : « Cela souligne également l'importance de notre évolution d'outils purement d'investigation - analysant les transactions après coup - vers des solutions proactives qui détectent et préviennent les pertes de fonds avant même qu'elles ne se produisent. »
Forces et faiblesses des mixeurs de cryptomonnaies
Comme toute solution dans l'espace des actifs numériques, les mixeurs de cryptomonnaies présentent leurs forces et leurs faiblesses. Dans la partie suivante, nous présenterons certaines des principales forces et faiblesses :
Forces
Confidentialité et anonymat renforcés : L'un des principaux atouts des mixeurs de cryptomonnaies est leur capacité à offrir aux utilisateurs une confidentialité accrue. Ces services empêchent les outils d'analyse de la blockchain de tracer facilement les transactions en brisant le lien entre l'expéditeur et le destinataire. Cela est particulièrement important pour les personnes qui accordent de l'importance à la confidentialité financière, comme les journalistes, les activistes ou les individus vivant sous des régimes oppressifs.
Protection contre la surveillance et le traçage : Les agences gouvernementales, les entreprises et les acteurs malveillants surveillent de plus en plus les transactions sur la blockchain. Les mixeurs de cryptomonnaies permettent aux utilisateurs d'empêcher l'examen de leurs activités financières, garantissant ainsi la confidentialité de leurs habitudes de dépense et de leur patrimoine.
Sécurité contre les piratages et les attaques ciblées : Les pirates et les escrocs ciblent souvent les utilisateurs détenant d'importantes quantités de cryptomonnaies. Si les transactions d'un individu peuvent être tracées, il devient une cible potentielle. Les mixeurs de cryptomonnaies aident à masquer l'historique des transactions, rendant plus difficile pour les acteurs malveillants d'identifier et d'exploiter les détenteurs de montants importants.
Rupture de l'historique des transactions pour la fongibilité : Certaines cryptomonnaies, comme le Bitcoin, disposent d'un registre public qui enregistre toutes les transactions. Cela peut conduire à ce que certaines pièces soient "souillées" en raison d'associations antérieures avec des activités illicites. En utilisant un mixeur, les utilisateurs peuvent effectivement "nettoyer" leurs pièces, améliorant ainsi la fongibilité des actifs numériques.
Options décentralisées et non-dépositaires : Certains mixeurs de cryptomonnaies fonctionnent de manière décentralisée, ce qui signifie qu'ils ne nécessitent pas que les utilisateurs fassent confiance à une entité centrale pour leurs fonds. Les mixeurs non-dépositaires augmentent la sécurité et réduisent le risque d'escroqueries à la sortie ou de saisies par les forces de l'ordre.
Faiblesses
Association avec des activités illicites : L'une des plus grandes critiques des mixeurs de cryptomonnaies est leur association avec le blanchiment d'argent, le financement du terrorisme et d'autres activités illégales. Parce qu'ils masquent l'origine des transactions, les criminels les ont utilisés pour blanchir des cryptomonnaies volées ou obtenues illégalement. Cela a conduit à une surveillance accrue de la part des agences de régulation et des forces de l'ordre.
Répression réglementaire et problèmes juridiques : Les gouvernements du monde entier imposent des réglementations plus strictes sur les outils de confidentialité financière, y compris les mixeurs de cryptomonnaies. Certaines juridictions ont carrément interdit leur utilisation, tandis que d'autres exigent que les mixeurs se conforment aux réglementations anti-blanchiment (AML) et de connaissance du client (KYC). Cette incertitude juridique pose un risque significatif pour les utilisateurs et les opérateurs de services de mixage.
Risque d'escroqueries à la sortie et de vol : De nombreux mixeurs de cryptomonnaies fonctionnent comme des services de conservation centralisés (custodial), nécessitant que les utilisateurs leur fassent confiance avec leurs fonds pendant le processus de mixage. Cela a conduit à des cas où les opérateurs ont volé les fonds déposés dans ce qu'on appelle des "exit scams". Les utilisateurs qui s'appuient sur des mixeurs centralisés risquent de perdre leurs actifs sans aucun recours.
Frais élevés et retards de transaction : De nombreux mixeurs facturent des frais pouvant atteindre 5 % du montant de la transaction. De plus, le mixage peut introduire des retards, obligeant les utilisateurs à attendre que plusieurs transactions soient traitées avant de recevoir leurs fonds. Ces facteurs peuvent rendre les mixeurs peu pratiques et coûteux pour les utilisateurs recherchant la confidentialité.
Garanties d'anonymat incohérentes : L'efficacité d'un mixeur de cryptomonnaies dépend du nombre d'utilisateurs participant au service. Si trop peu de personnes utilisent un mixeur particulier, l'ensemble d'anonymat est plus petit, ce qui facilite la liaison des transactions par les analystes de la blockchain. De plus, certains mixeurs ne mettent pas en œuvre des mesures de confidentialité robustes, laissant les utilisateurs vulnérables à la désanonymisation.
Conclusion
Souvent associés au blanchiment d’argent et aux activités criminelles, les mixeurs de cryptos ont pourtant des usages légitimes et jouent un rôle clé dans la confidentialité des transactions on-chain. Ils permettent notamment aux donateurs politiques de préserver leur anonymat, aux particuliers fortunés de sécuriser leur vie privée et aux philanthropes d’effectuer des dons sans être identifiés. Mais plus simplement, ils renforcent la vie privée en ligne.
Au-delà de ces cas d’usage, les mixeurs contribuent également à préserver la fongibilité des cryptomonnaies. En mélangeant les actifs, ils empêchent d’associer un jeton ou une pièce à une transaction passée, garantissant ainsi qu’aucun historique ne puisse affecter sa valeur ou son acceptation. Cette caractéristique essentielle assure que les cryptomonnaies restent interchangeables et utilisables librement, sans risque de discrimination liée à leur provenance.
D’un point de vue technologique, les mixeurs représentent une avancée majeure dans l’écosystème crypto. En s’appuyant sur des smart contracts pour les blockchains compatibles EVM ou sur des systèmes UTXO pour Bitcoin et ses équivalents, ces protocoles permettent de dissocier les adresses de dépôt et de retrait, garantissant ainsi un haut niveau de confidentialité.
Avec la montée en puissance des cryptomonnaies et la diminution de la part des flux illicites dans les transactions globales, ces outils pourraient progressivement se détacher de leur image négative. À condition d’être bien encadrés, ils pourraient même évoluer vers une conformité accrue aux régulations anti-blanchiment tout en continuant à remplir leur mission première : assurer la protection de la vie privée et la fongibilité des actifs numériques.
Avant d’investir dans un produit, l’investisseur doit comprendre entièrement les risques et consulter ses propres conseillers juridiques, fiscaux, financiers et comptables.


