Ripple contre la SEC : une bataille judiciaire décisive pour l’avenir des cryptos aux États-Unis

Depuis quatre ans, Ripple et la SEC s’affrontent dans un procès aux enjeux considérables pour l’industrie crypto. Accusée d’avoir levé 1,3 milliard de dollars illégalement, Ripple défend son modèle contre des régulateurs perçus comme hostiles. Cette affaire, qui mêle innovation, réglementation et politique, pourrait bientôt connaître son dénouement.
Depuis décembre 2020, la start-up américaine Ripple Labs, créateur de la cryptomonnaie XRP, est au centre d’un bras de fer judiciaire avec la Securities and Exchange Commission (SEC), le gendarme financier des États-Unis. À l’origine de cette bataille, la SEC accuse Ripple d’avoir levé illégalement plus de 1,3 milliard de dollars via des ventes non enregistrées de XRP, qu’elle considère comme une valeur mobilière. Ripple réfute ces accusations, soutenant que XRP est une cryptomonnaie, et non un titre soumis à la réglementation des valeurs mobilières.
Ce litige a évolué au fil des années à travers une série de jugements, d’appels et de déclarations publiques, reflétant un affrontement entre l’innovation (parfois trop) rapide de l’industrie crypto et une régulation perçue comme dépassée. Alors que l’affaire progresse, elle a des implications profondes non seulement pour Ripple, mais aussi pour l’ensemble du secteur des cryptomonnaies et la réglementation des actifs numériques.
Chronologie des événements
Depuis le dépôt de la plainte par la SEC en décembre 2020, l’affaire a connu plusieurs rebondissements majeurs. Au départ, Ripple a contesté les accusations en affirmant que la SEC n’avait jamais fourni de directives claires sur la classification des actifs numériques. En juillet 2023, le juge new-yorkaise Analisa Torres a rendu une décision partielle en faveur de Ripple, déclarant que les ventes de XRP sur les marchés secondaires, comme les échanges de crypto-monnaies, ne constituaient pas des offres de valeurs mobilières. Cependant, les ventes directes à des investisseurs institutionnels (fonds de capital-risque et des institutions financières principalement) ont été jugées comme enfreignant les lois sur les valeurs mobilières.
En août 2024, Ripple a été condamné par la justice à une amende de 125 millions de dollars, bien en deçà des 2 milliards initialement réclamés par la SEC, marquant une victoire symbolique pour l’entreprise. Toutefois, en octobre 2024, la SEC a fait appel de cette décision, tandis que Ripple a contre-attaqué à son tour pour clarifier d’autres aspects du jugement.
Un tournant en janvier 2025 ?
Le 15 janvier 2025 est une date importante dans cette bataille juridique. La SEC doit soumettre ses derniers arguments devant la cour d’appel, tandis que Ripple déposera sa réponse en février. Cette échéance marque un point de bascule potentiel dans l’affaire, car elle pourrait définir le cadre des débats à venir. En outre, les spéculations sur un règlement potentiel ou une décision favorable à Ripple augmentent. Certains analystes, comme l’avocat Jeremy Hogan, estiment qu’un règlement pourrait intervenir sous une administration plus favorable aux cryptomonnaies, surtout après le changement de leadership à la SEC et le départ programmé de son président Gary Gensler, en place depuis 2021.
Changement de leadership à la SEC : Une opportunité pour Ripple ?
Le départ imminent de Gary Gensler, prévu pour le 20 janvier 2025 soit le jour de l'investiture de l’administration Trump, pourrait être un tournant majeur. Connu pour son approche sévère envers les cryptomonnaies, Gary Gensler a souvent été critiqué pour son recours excessif aux poursuites judiciaires vis-à-vis de cette industrie. Son successeur pressenti, Paul Atkins, est perçu comme plus favorable à l’innovation technologique et pourrait adopter une approche moins conflictuelle envers les actifs numériques. Selon Christopher Giancarlo, ancien président de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) - le deuxième régulateur financier américain - et défenseur des cryptomonnaies, la SEC pourrait même abandonner son appel contre Ripple une fois Gary Gensler remplacé. Un tel changement de cap pourrait permettre à Ripple de parvenir à un règlement négocié, évitant ainsi une prolongation de cette bataille judiciaire qui a déjà coûté à l’entreprise plus de 150 millions de dollars en frais juridiques.
Ripple contre-attaque : Les axes principaux de l’appel
En réponse à l’appel de la SEC, Ripple a enclenché une nouvelle procédure visant à clarifier plusieurs points cruciaux de l’affaire. L’entreprise conteste la définition juridique de « contrat d’investissement », arguant que les ventes de XRP ne répondent pas aux critères établis par le test de Howey (qui détermine si un actif est une valeur mobilière ou non). Ripple affirme également que la SEC n’a jamais fourni de directives claires sur la classification des cryptomonnaies. Enfin, l’entreprise cherche à limiter la portée de l’injonction prononcée par la cour, qui pourrait imposer des restrictions inutiles à ses activités futures. Ces initiatives reflètent une stratégie proactive visant à sécuriser des victoires juridiques définitives et à protéger son activité.
Implications pour l’industrie des cryptomonnaies
Le litige Ripple contre la SEC dépasse le cadre de l’entreprise elle-même et pourrait redéfinir le paysage réglementaire des actifs numériques aux États-Unis. La décision partielle du jugement de l’été 2023, qui affirme que les ventes de XRP sur les marchés secondaires ne constituent pas des valeurs mobilières, a déjà établi un précédent juridique susceptible de bénéficier à d’autres projets crypto. Cependant, l’incertitude persiste concernant la classification des ventes institutionnelles, ce qui freine potentiellement l’adoption des cryptomonnaies aux États-Unis. En outre, l’issue de cette affaire pourrait influencer la manière dont les régulateurs abordent les actifs numériques, en encourageant une approche plus collaborative et moins punitive. Les acteurs de l’industrie attendent également des clarifications sur les règles applicables, car l’absence de cadre clair entrave leur capacité à innover et à se développer.
Les étapes à venir
Les mois à venir seront déterminants. Après le dépôt des derniers arguments des uns et des autres en janvier et février 2025, des plaidoiries sont prévues pour septembre ou octobre de la même année. Une décision finale pourrait être rendue début 2026, sauf si un règlement intervient avant cette date. Pendant ce temps, l’évolution politique à la SEC et l’éventuelle adoption de lois plus favorables aux cryptomonnaies sous une administration pro-crypto pourraient remodeler le cadre réglementaire. En attendant, Ripple continue de défendre son modèle économique et son rôle dans l’écosystème des cryptomonnaies, tout en cherchant à établir une jurisprudence qui favoriserait l’innovation.
Avant d’investir dans un produit, l’investisseur doit comprendre entièrement les risques et consulter ses propres conseillers juridiques, fiscaux, financiers et comptables.


