Analyse : Linea dévoile les tokenomics les plus alignés avec Ethereum pour un L2

Analyse : Linea dévoile les tokenomics les plus alignés avec Ethereum pour un L2

Deux après son lancement, Linea dévoile son token en misant sur une tokenomics favorable, une technologie sécurisée et ses liens avec Consensys. Reste à savoir si ces atouts suffiront pour rivaliser avec les géants du marché des layers 2.

Ce qu’il faut savoir avant de commencer

Linea est un layer 2 d’Ethereum qui mise sur une approche différente pour s’imposer dans un marché déjà dense. Son positionnement repose sur quatre piliers : un alignement direct avec Ethereum, des tokenomics pensées pour ses utilisateurs, une intégration privilégiée avec Metamask et une perspective de liquidité importante grâce au potentiel déploiement des ETH détenus par Sharplink Gaming.

L’objectif de Linea est clair : devenir une infrastructure de référence pour la finance décentralisée. Pour y parvenir, le réseau mise sur un programme d’incitations ciblé, conçu pour accélérer le développement d’applications clés.

Parmi elles, Etherex, son exchange décentralisé natif, occupe une place stratégique et pourrait servir de vitrine pour attirer développeurs, investisseurs et utilisateurs.

Présentation générale

Linea est un zk-rollup d’Ethereum, un layer 2 qui hérite de la sécurité de son layer 1 grâce à des preuves cryptographiques.

Lancé en juillet 2023, il est développé par Consensys, la société fondée par Joseph Lubin, co-créateur d’Ethereum et également responsable de Metamask, l’un des wallets les plus utilisés dans l’écosystème crypto (plus de 30 millions d’utilisateurs).

L’objectif de Linea est de proposer une infrastructure capable d’allier personnalisation, haut débit de transactions et coûts réduits, tout en restant ancrée dans la sécurité et l’effet de réseau d’Ethereum.

Compatible avec l’Ethereum Virtual Machine (EVM), Linea permet de déployer la quasi-totalité des applications existantes sans modification de leur code.

Cette compatibilité facilite le travail des développeurs et réduit les frictions pour les projets souhaitant migrer ou se lancer directement sur le réseau. Au-delà de cette dimension technique, Linea veut instaurer un modèle inédit : tous les ETH transférés sur le réseau seraient automatiquement placés en staking liquide via Lido V3.

Contrairement à Blast, qui reversait directement ces rendements aux utilisateurs, Linea prévoit de les centraliser dans un fonds destiné à soutenir certaines applications DeFi stratégiques.

Ce mécanisme vise à créer une source de revenus continue réinjectée dans l’écosystème pour en stimuler la croissance.

Sharplink, une société de trésorerie centrée sur Ethereum également dirigée par Joseph Lubin, pourrait jouer un rôle déterminant dans cette dynamique. Sa capitalisation atteint déjà 2,2 milliards de dollars et pourrait alimenter massivement la liquidité de Linea à mesure de ses achats supplémentaires d’ETH.

Si cette stratégie se confirme, Linea pourrait rapidement figurer parmi les layers 2 les plus importants en valeur déposée (TVL), alors qu’il affiche actuellement environ 160 millions de dollars de TVL (contre 4,3 milliards de dollars pour Base, le leader des L2).

Pour éviter le scénario observé chez d’autres layers 2 dont l’activité a chuté après leur airdrop, Linea a repoussé à plusieurs reprises son lancement de token afin d’affiner son modèle.

La répartition annoncée est marquée par une forte orientation communautaire : 85 % des tokens seront alloués aux utilisateurs et au développement de l’écosystème, tandis que Consensys n’en conservera que 15 %.

Aucun token n’a été réservé à des investisseurs privés ou à des conseillers.

Le modèle économique de Linea se distingue par sa double mécanique de burn : 80 % des bénéfices du réseau seront utilisés pour racheter et détruire des tokens Linea, tandis que 20 % serviront à brûler de l’ETH, renforçant ainsi son alignement avec Ethereum.

Fonctionnement

Les rollups représentent la catégorie de layers 2 la plus sécurisée puisqu’ils publient l’intégralité de leurs données de transactions sur Ethereum. Cette approche garantit aux utilisateurs la possibilité de retirer leurs fonds vers le layer 1, même en cas de tentative de censure généralisée sur le réseau.

Dans cette famille, les zk-rollups se distinguent par leur capacité à publier régulièrement des preuves cryptographiques attestant de l’intégrité des transactions. Ce mécanisme permet de transférer ses fonds vers Ethereum en seulement quelques heures via leur bridge natif, contre un délai de sept jours pour les rollups optimistes.

Il reste néanmoins possible d’utiliser des bridges tiers, qui offrent des transferts quasi instantanés. Ces solutions sont d’autant plus efficaces avec les zk-rollups que leurs opérateurs peuvent rééquilibrer leurs liquidités entre les chaînes beaucoup plus rapidement.

L’un des principaux défis techniques réside dans la difficulté à “prouver” l’Ethereum Virtual Machine (EVM).

La plupart des zk-rollups contournent cet obstacle en adoptant des architectures alternatives, comme RISC-V, où l’EVM est réécrit ou émulé pour faciliter la génération de preuves.

Linea adopte une approche différente : il prouve directement la validité de l’EVM. Cette méthode réduit la complexité et la surface d’attaque, tout en offrant un cadre de sécurité plus robuste et fidèle à l’architecture d’Ethereum.

>> Layers 2 Ethereum : état des lieux et défis

Financement

Consensys, l’entreprise à l’origine de Linea, a levé 725 millions de dollars au total lors de cinq tours de financement. Sa dernière valorisation s’établissait à 7 milliards de dollars. Parmi ses investisseurs figurent des acteurs de premier plan, aussi bien issus du secteur crypto, comme Dragonfly et Coinbase Ventures, que de la finance traditionnelle, avec notamment BlackRock, JP Morgan, Mastercard et UBS.

Un point notable concerne l’absence d’allocation spécifique du token de Linea à ces investisseurs. Ce choix permet d’éviter toute dilution excessive et préserve la structure de distribution orientée vers les utilisateurs et l’écosystème du réseau.

Équipe

Joseph Lubin, PDG de Consensys, est diplômé en ingénierie informatique de l’université de Princeton. Avant de cofonder Ethereum puis de créer Consensys, il a travaillé dans la robotique et occupé le poste de vice-président de la technologie chez Goldman Sachs.

Declan Fox, nommé responsable de Linea en avril 2025 après avoir été chef de produit, est diplômé en ingénierie de l’université de Cardiff. Il pilote aujourd’hui la stratégie et le développement de Linea, avec pour objectif de renforcer son alignement avec Ethereum et d’accélérer l’adoption du réseau.

>> Interview - Declan Fox : “Linea veut réconcilier les L2 avec Ethereum”

Communauté

Linea bénéficie d’une communauté déjà large avec 1,3 million de followers sur X et 400 000 membres sur Discord. Cet ancrage communautaire constitue un levier essentiel pour attirer développeurs, utilisateurs et projets vers l’écosystème du layer 2.

Le token LINEA

La répartition du token de Linea est largement orientée vers la communauté et le développement de son écosystème. Sur l’ensemble de l’offre, 85 % sont dédiés à l’écosystème, dont 10 % pour l’airdrop initial. Les 15 % restants sont attribués à Consensys, avec une période de blocage de cinq ans.

Ce modèle tranche avec celui de nombreux autres projets où les investisseurs privés captent entre 20 % et 35 % de l’offre totale.

L’absence de tels investisseurs, combinée à l’allocation limitée et longuement verrouillée de Consensys, permet à Linea de mobiliser la quasi-totalité de ses tokens pour stimuler la croissance de son réseau.

Par ailleurs, la tokenomics intègre un mécanisme clair de création de valeur : 80 % des profits issus des frais de transaction seront utilisés pour racheter et détruire des tokens Linea, réduisant ainsi leur offre disponible sur le marché.

Modèle économique et gouvernance

Le modèle économique de Linea s’apparente à celui de la plupart des layers 2 : les frais de transaction sont en partie destinés à la publication des données sur Ethereum, le reste constituant les profits du réseau. Au cours des 30 derniers jours, ces profits se sont élevés à environ 130 000 dollars.

La technologie de Linea est entièrement open source, ce qui permet à tout acteur de réutiliser ou de modifier son code, y compris à des fins commerciales. Plusieurs projets, comme Ethereum Name Service ou Status, prévoient déjà de lancer leurs propres blockchains en utilisant le stack de Linea, ce qui pourrait renforcer sa diffusion.

Si cette tendance se confirme, Consensys pourrait explorer des solutions de monétisation complémentaires, notamment autour de l’interopérabilité entre chaînes construites sur son infrastructure.

Il est important de noter que, puisque la totalité des profits issus des frais sera utilisée pour racheter et brûler des tokens LINEA et de l’ETH, le projet ne disposera pas de marge pour réinvestir directement ses revenus dans sa croissance. Le financement de son développement restera donc assuré par Consensys, qui dispose d’une trésorerie importante.

La gouvernance de Linea repose sur un consortium réunissant Consensys, Sharplink, EigenLabs, ENS Labs et Status. Cette structure vise à combiner un certain degré de décentralisation avec la capacité d’agir rapidement.

Elle pourrait, si nécessaire, faire évoluer la politique d’utilisation des revenus afin de s’adapter aux besoins de l’écosystème.

Partenariats et écosystème

Linea bénéficie d’un partenariat stratégique avec Metamask, tous deux développés par Consensys. Cette intégration est appelée à jouer un rôle clé dans l’adoption du réseau : la future carte de paiement de Metamask nécessitera en effet que les fonds de l’utilisateur soient déposés sur Linea pour fonctionner. Cette synergie pourrait constituer un moteur important pour la croissance de la base d’utilisateurs du layer 2.

Un autre élément potentiel de soutien pour Linea réside dans sa proximité avec Sharplink, la treasury company dirigée elle aussi par Joseph Lubin. Bien qu’aucune annonce officielle n’ait été faite, cette relation pourrait se traduire par une mobilisation des fonds de Sharplink sur Linea, offrant au réseau un flux de liquidité significatif et renforçant son attractivité pour les développeurs d’applications DeFi.

>> Sharplink, le bras armé de Consensys et Linea

Malgré ces atouts, Linea a jusqu’ici rencontré des difficultés à faire émerger des applications véritablement différenciantes. À ce stade, Zerolend constitue le protocole dominant en termes de valeur totale verrouillée (TVL). Basé sur Aave V3, il propose plusieurs instances, dont deux spécialisées dans les memecoins CROAK et FOXY. Aave lui-même se positionne en deuxième place sur le réseau, confirmant le rôle central du lending dans l’écosystème de Linea.

Côté trading décentralisé, Lynex est actuellement le DEX le plus important de Linea. Il repose sur le modèle ve(3,3), popularisé par Ramses V3 et Velodrome, où les fournisseurs de liquidité sont rémunérés exclusivement en tokens natifs, tandis que les détenteurs de ces tokens perçoivent les frais de trading et influencent l’allocation des incentives.

Etherex, lancé le 28 juillet, est annoncé comme le futur DEX principal de Linea. Issu d’une collaboration entre les équipes de Linea et celles de Nile Exchange, il adoptera un modèle proche du ve(3,3) tout en supprimant la contrainte de verrouillage à long terme pour accéder aux revenus du protocole.

>> DeFi sur Ethereum : État des lieux et perspectives

Sa distribution de tokens REX est prévue comme suit : 25 % pour Linea, 25 % pour les détenteurs de NILE (le snapshot a déjà été effectué), 40 % pour la trésorerie, 5 % pour les CEX et market makers, et 5 % pour les partenaires de l’écosystème Linea.

Au-delà de la DeFi traditionnelle, Linea voit également arriver plusieurs projets innovants.

Theo est un protocole de tokenisation qui permet d’accéder à des rendements issus de bons du Trésor ou de stratégies comme le basis trade popularisé par Ethena.

Deri, un protocole de trading d’options présent sur une dizaine de blockchains, y est aussi déployé.

Enfin, Myriad, une plateforme de marchés prédictifs initialement lancée sur Abstract, a annoncé son déploiement prochain sur Linea, en partenariat avec les médias Decrypt et Rug Radio.

Limites et risques

Linea a été lancée il y a deux ans et traverse depuis la fin de sa campagne d’airdrop une période de ralentissement.

Cette campagne avait initialement stimulé l’activité sur le réseau en incitant les utilisateurs à participer à diverses quêtes et à déposer de la liquidité.

Mais depuis l’arrêt du programme d’incentives en octobre 2024, la valeur totale verrouillée (TVL) de Linea ne cesse de reculer, reflétant une difficulté à maintenir un niveau d’activité organique.

Malgré son lien direct avec Metamask, Linea n’a pas bénéficié d’une promotion significative via le wallet.

Ce dernier, autrefois leader incontesté, a perdu de sa dynamique face à des alternatives comme Rabby, plus modernes et mieux intégrées aux usages actuels. Cette situation réduit l’effet de levier qu’aurait pu représenter l’intégration native de Linea dans Metamask.

Par ailleurs, le choix de pousser Etherex comme DEX officiel du réseau pourrait dissuader l’arrivée d’applications concurrentes et limiter la diversité de l’écosystème, un risque qui pourrait s’avérer contre-productif sur le long terme.

Conformité réglementaire

Le consortium Linea est structuré comme une entité à but non lucratif enregistrée dans l’État du Delaware. Pour l’instant, aucune régulation spécifique ne vise directement les layers 2, mais le statut juridique de Linea pourrait être amené à évoluer à mesure que le cadre réglementaire autour des blockchains se précise.

Cette incertitude reste un élément à surveiller, notamment pour les investisseurs institutionnels qui privilégient des environnements réglementaires clairs.

Concurrence

Linea doit s’imposer dans un marché des layers 2 particulièrement compétitif. Base, soutenu par Coinbase, domine avec près de 4,3 milliards de dollars de TVL, grâce à la puissance de distribution de l’exchange américain. Arbitrum suit avec environ 2,9 milliards de dollars et bénéficie de son ancienneté et d’un écosystème DeFi riche qui continue d’attirer de nouvelles applications.

>> Base : Analyse du L2 développé par Coinbase

>> Arbitrum (ARB) : Analyse du pionnier des L2

Unichain, avec 1 milliard de dollars de TVL, a connu une forte croissance alimentée principalement par un programme d’incentives dont la pérennité reste incertaine.

>> Unichain : Ethereum est-il menacé si ses gros projets lancent des L2 ?

Face à ces acteurs, Linea affiche actuellement une TVL d’environ 160 millions de dollars, ce qui en fait le zk-rollup le plus important.

Toutefois, il doit aussi composer avec d’autres zk-rollups tels que ZKsync Era, qui mise sur une approche multichain, ou Starknet, dont l’usage du langage propriétaire Cairo freine son adoption. Dans cet environnement, Linea devra trouver un positionnement différenciant pour s’imposer durablement.

Roadmap

Linea prévoit de continuer à optimiser ses performances techniques.

Le réseau dispose actuellement d’un débit de 15 mgas/s, soit quatre fois supérieur à celui d’Ethereum (3,75 mgas/s), et ambitionne d’aller plus loin.

L’une des prochaines étapes majeures consistera à réduire la latence des blocs de 2 secondes à 0,25 seconde au cours des deux prochaines années. Cette évolution vise à offrir une expérience utilisateur fluide et à renforcer l’attractivité du réseau, notamment pour les applications nécessitant une exécution rapide.

D’ici octobre 2025, Linea compte également activer le staking automatique des ETH déposés sur son réseau, une fonctionnalité qui permettra de générer des revenus passifs directement intégrés à l’infrastructure.

À plus long terme, le projet explore la possibilité de devenir un “rollup based” natif, où les transactions seraient ordonnées par les validateurs d’Ethereum et où l’environnement d’exécution serait identique à celui du layer 1.

Si cette ambition se concrétise, elle pourrait renforcer considérablement la sécurité de Linea et simplifier son intégration avec Ethereum et les autres L2 alignés.

L’avis de The Big Whale

Linea bénéficie d’atouts considérables, à commencer par le soutien de Consensys, une entreprise dotée de moyens financiers importants et propriétaire de Metamask, l’un des wallets les plus utilisés au monde.

Pourtant, deux ans après son lancement, le réseau reste en deçà des attentes, que ce soit en termes d’adoption ou d’activité. L’intégration avec Metamask aurait pu constituer un levier de distribution majeur, mais son manque d’exploitation jusqu’à présent a limité l’impact de cette synergie. Le lancement de la carte de paiement de Metamask pourrait toutefois changer la donne et servir de catalyseur.

Dans un marché dominé par quelques acteurs bénéficiant d’effets de réseau puissants, chaque layer 2 doit impérativement se différencier pour espérer exister. Linea, malgré ses difficultés actuelles, conserve plusieurs atouts stratégiques : une répartition de tokens très favorable à son écosystème, un mécanisme de capture de valeur clair, des liens étroits avec Metamask et Sharplink, ainsi qu’une architecture technique solide axée sur la sécurité. Toutefois, il reste à démontrer que l’alignement fort avec Ethereum suffira à séduire développeurs, investisseurs et utilisateurs.

Dans cet environnement, un seul cas d’usage différenciant pourrait suffire à relancer la dynamique de Linea. Grâce à ses connexions privilégiées avec les principaux acteurs de la crypto et de la finance traditionnelle, le réseau dispose encore d’une marge de manœuvre importante pour nouer des partenariats clés et retrouver un rôle central dans l’écosystème Ethereum.

>> The Ethereum Briefing - Tout ce qu’il faut savoir sur Ethereum au 1er semestre 2025

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