Dominic Williams (DFINITY) : "Nous allons avoir des agents IA à la fois autonomes et auditables"

Dominic Williams (DFINITY) : "Nous allons avoir des agents IA à la fois autonomes et auditables"

Fondateur et directeur scientifique de DFINITY, Dominic Williams est l'un des plus ardents défenseurs de la convergence entre blockchain et IA. Pour cet entrepreneur britannique, la technologie blockchain ouvre la voie à une nouvelle génération d'applications dans de nombreux domaines (e-commerce, finance…), à la fois autonomes et transparentes.

Depuis des années, vous militez avec DFINITY pour une convergence entre l'IA et la blockchain. Où en est la fondation et votre projet d’Internet Computer ?

DFINITY est une fondation à but non lucratif qui développe l'Internet Computer, un nouveau type d'ordinateur mondial.

L'idée est de créer une infrastructure informatique décentralisée capable d'héberger des applications directement sur Internet, sans recourir aux serveurs traditionnels ni aux clouds centralisés comme Amazon ou Google.

Nous voulons réinventer l'architecture d'Internet pour qu'elle soit ouverte, sécurisée, accessible à tous et, surtout, capable de supporter des applications complexes à grande échelle.

Ce qui fait l'originalité du projet, c'est l'intégration d'une blockchain avancée qui sert de couche de consensus décentralisée, mais aussi de plateforme de calcul distribué très rapide.

Cette infrastructure permet d'exécuter du code dans la blockchain avec une latence extrêmement faible et une scalabilité presque illimitée. Cela ouvre la porte à une nouvelle génération d'applications décentralisées, notamment dans des domaines qui nécessitent beaucoup de calcul, comme l'intelligence artificielle.

Face aux enjeux de décentralisation, comment votre blockchain se distingue-t-elle techniquement des solutions existantes, et quelle est votre réponse aux critiques sur la vraie décentralisation ?

Contrairement aux blockchains traditionnelles comme Bitcoin ou Ethereum, qui dépendent souvent de serveurs centralisés dans des centres de données appartenant à des géants du cloud comme Amazon Web Services, l'Internet Computer fonctionne sur un réseau mondial de nœuds physiques exploités par des fournisseurs indépendants.

Ces nœuds sont opérés sur du matériel “souverain”, ce qui signifie que l'infrastructure est totalement décentralisée, sans dépendance à un fournisseur cloud unique.

Cette décentralisation physique garantit une indépendance technologique, une sécurité renforcée et une résilience accrue.

Plus important encore, notre protocole a été conçu pour exécuter des applications et des smart contracts à grande échelle, avec des performances très élevées, tout en conservant la transparence et la confiance propres à la blockchain.

Dans quelle mesure la diversité et l'indépendance de vos fournisseurs de nœuds sont-elles garanties, et comment évitez-vous les risques de centralisation ?

Nous comptons environ une centaine de fournisseurs de nœuds à travers le monde, qui exploitent des machines dédiées pour sécuriser et faire tourner le réseau.

Parmi eux, certaines institutions financières, comme Signum Bank à Zurich, jouent un rôle important. Signum est une banque crypto-friendly qui fournit plusieurs nœuds pour notre réseau.

Cela montre que des acteurs traditionnels du secteur financier s'intéressent à cette infrastructure blockchain nouvelle génération.

Au-delà des synergies techniques, quels sont les enjeux stratégiques et sociétaux de la convergence entre blockchain et IA que vous défendez ?

C'est une révolution en devenir. La blockchain offre une infrastructure décentralisée, transparente et sécurisée, tandis que l'IA nécessite des capacités de calcul puissantes et fiables. En combinant les deux, nous pouvons créer des agents IA capables d'agir de manière autonome, intelligentes, et transparentes grâce à la blockchain. Assez vite, nous allons avoir des agents IA à la fois autonomes et auditables.

Notre futur produit, Caffeine.ai, sera la première plateforme auto-écrite au monde spécifiquement conçue pour l'intelligence artificielle, bâtie sur la stack de l'Internet Computer. Cela signifie que cette plateforme pourra générer et exécuter du code de façon autonome, sur une infrastructure sécurisée, décentralisée et scalable.

Pour les entreprises, de la start-up aux grands groupes, c'est un vrai saut en avant : elles pourront développer des solutions IA sans dépendre des géants du cloud, avec une meilleure maîtrise des données, plus de transparence et une sécurité accrue. Cela ouvre des perspectives inédites dans des secteurs comme la finance, l'assurance, la santé, ou encore la gouvernance.

Pourquoi avoir choisi Zurich comme hub stratégique, et comment cette implantation s'inscrit-elle dans votre vision à long terme ?

Zurich est un véritable hub technologique avec une densité de talents exceptionnelle, notamment grâce à l'ETH Zurich et la présence de grandes entreprises comme Google, IBM, Meta, OpenAI, ou Anthropic. C'est une ville idéale pour monter un centre de recherche et d'ingénierie de pointe.

Nous avons plus de 150 collaborateurs ici à Zurich, dans un bâtiment de sept étages. C'est un lieu de travail collaboratif où se concentre une grande partie de notre talent et de notre savoir-faire technique. La Suisse, avec sa stabilité politique et son cadre réglementaire clair, est aussi favorable à la crypto et à l'innovation.

Dans le contexte géopolitique actuel, comment votre ancrage européen influence-t-il vos relations avec les régulateurs et les gouvernements ?

Nous avons des échanges avec eux, comme avec d'autres gouvernements de la planète.

Face à la domination d'acteurs comme OpenAI ou Mistral, quelle est votre stratégie de différenciation, et comment comptez-vous vous imposer sur le marché de l'IA ?

Il y a énormément de cas d'usage.

On pense aux réseaux sociaux décentralisés, à la finance décentralisée (DeFi), à la gouvernance autonome, mais aussi à des services cloud sans intermédiaire, et bien sûr à l'intégration d'IA dans des applications critiques. Par exemple, imaginez des systèmes de recommandation, des analyses prédictives, ou même des assistants virtuels totalement décentralisés et transparents.

Concernant des acteurs comme ChatGPT ou Le Chat, nous n'avons pas la même infrastructure. La nôtre a été conçue pour permettre d'exécuter des calculs complexes à haute vitesse directement dans la blockchain qui est pourtant l'infrastructure du futur.

Demain, toutes les entreprises comme les banques, les assurances ou d'autres entreprises qui veulent construire des applications avec de l'IA et les avantages de la crypto pourront nous utiliser.

Comment les entreprises peuvent-elles concrètement s'engager dans votre écosystème, et quels sont vos objectifs de développement pour les prochains mois ?

Nous organisons régulièrement des événements à Paris, Genève, Londres et bientôt Zurich. Ces rencontres permettent de rapprocher les acteurs de la finance, de la tech et de la blockchain pour échanger et collaborer.

Nous travaillons avec plus de 70 entreprises, notamment dans la finance, les assurances, et la tech, qui veulent comprendre comment travailler avec DFINITY et tirer parti de l'Internet Computer.

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