Konstantin Richter (Blockdaemon) : "La demande des banques américaines a triplé en quelques mois"

Lancé en 2017, Blockdaemon s'est imposé comme l'un des leaders dans les services crypto aux entreprises (staking, nœuds, wallets). Cette position privilégiée, avec des centaines de clients institutionnels, lui offre une perspective unique sur le marché mondial, où les États-Unis prennent désormais le leadership, comme nous l'explique son cofondateur et CEO, Konstantin Richter.
The Big Whale : Vous avez l'habitude de dire que Blockdaemon est « la plus grande entreprise crypto dont personne n'a entendu parler ». Pourquoi ?
Konstantin Richter : Parce que je trouve que c'est ce qui nous définit le mieux. En quelques années, nous sommes devenus l'un des poids lourds du secteur sans pour autant que notre notoriété augmente. Nous sommes l'un des plus gros acteurs de cette industrie et beaucoup de gens ne nous connaissent pas. Ceci est plutôt logique puisque nous ne travaillons qu'avec des entreprises et institutions financières, donc le grand public n'est pas concerné.
Que fournissez-vous comme services ?
Nous fonctionnons autour de trois piliers.
Le premier est celui des nœuds. C'est notre produit de base, qui inclut des API et qui permet à n'importe lequel de nos clients d'interagir avec les blockchains (notamment validation de transactions).
Ensuite, nous avons une offre de staking en marque blanche. Nous ne proposons pas de produit de staking pour les particuliers, mais nous alimentons de grandes entreprises comme HashKey Capital, Bitcoin Suisse et bien d'autres.
Enfin, nous avons une activité de wallets complète qui nous permet d'équiper n'importe quelle entreprise.
Notre objectif est de permettre à n'importe quelle entreprise de devenir une plateforme crypto comme Coinbase. Notre technologie permet à n'importe quelle institution d'offrir des services d'achat, de vente, de conservation et de rémunération en crypto.
Combien de clients institutionnels avez-vous ?
Beaucoup. Parmi les 500 plus grandes entreprises mondiales offrant des services en crypto, 70 % d'entre elles sont nos clients.
Cette relation est-elle exclusive ? Par exemple, est-ce qu'une intsitution financière ne travaille-t-elle qu'avec vous ou avec d'autres fournisseurs ?
Cela dépend. Nous n'avons pas de véritable concurrent direct, car notre offre est assez unique. Notre plus proche concurrent serait probablement Fireblocks.
Nous voyons notre stack technologique à travers le prisme du portefeuille : tout ce qui active, crée de la valeur et permet des transactions autour du portefeuille.
Quels sont vos principaux clients ?
Nous travaillons avec PayPal, Bitcoin Suisse, Revolut, Plaid, Microsoft et d'autres.
Vous avez levé un demi-milliard de dollars et vous êtes valorisé entre 3 et 4 milliards. Quels sont vos principaux actionnaires ?
Nous sommes la seule entreprise crypto ayant trois des dix plus grandes institutions financières comme actionnaires majeurs : Goldman Sachs, JP Morgan et Citibank.
Quel est votre point de vue sur l'évolution de la réglementation aux États-Unis et son impact potentiel ?
Nous sommes très optimistes. Ça a déjà été un game changer pour nous. Nous sommes le seul fournisseur d'infrastructure basé aux États-Unis (Los Angeles, ndlr), ce qui est un atout majeur alors que beaucoup d'autres entreprises ont quitté le pays ces dernières années.
Avec la fin de la règle comptable SAB 121, qui empêchait les banques de détenir du Bitcoin pour le compte de leurs clients, la demande des banques américaines pour les services crypto de ce type a triplé en quelques mois.
Et en Europe et en Asie ?
L'Asie est notre plus grand marché. Nous nous y sommes beaucoup développés pendant que les États-Unis étaient en difficulté. L'Europe a toujours été plus lente, principalement parce que les institutions financières sont plus réticentes au risque et que les fonds de capital-risque y sont moins actifs. J'espère que le fait que les États-Unis aient changé de braquet va pousser l'Europe à bouger aussi.
Ne craignez-vous pas que des institutions financières développent leurs propres solutions de staking et que les banques aient leurs propres wallets ? Ce serait une menace pour votre modèle, n'est-ce pas ?
Non, car nous leur fournissons déjà ces solutions en marque blanche. Ils préfèrent externaliser pour éviter la responsabilité opérationnelle et bénéficier de notre économie d'échelle. C'est exactement comme avec le Cloud. Pourquoi avoir votre propre infrastructure quand vous avez Amazon ou Google qui le fait très bien ?
En termes de sécurité, comment assurez-vous la fiabilité de vos services ?
Nous investissons massivement dans la sécurité, notamment avec notre portefeuille (MPC, ndlr) que nous avons nous-mêmes développé. La sécurité est notre priorité absolue.
Qu'est-ce qui manque aujourd'hui pour voir une adoption massive des institutions financières ?
Principalement la réglementation. Les institutions ont besoin d'un cadre juridique clair. Avec les nouvelles réglementations, nous prévoyons une adoption massive dans les 12 à 18 mois. Le mouvement a démarré, mais cela va prendre un peu de temps pour qu'il prenne sa pleine puissance. Les marchés B to B ne fonctionnent pas comme les marchés en B to C.
Quels sont vos objectifs pour 2025 ?
Essentiellement de travailler avec les grandes banques aux États-Unis. Il y a énormément de choses à faire avec elles en termes d'équipement. Elles ont besoin de servir leurs millions de clients et nous allons les aider. Nous allons aussi investir en Europe et lancer de nouveaux produits de staking.
Combien d'employés avez-vous ?
Au total, nous sommes 200. Il y a 70-80 personnes en Europe, 80-100 aux États-Unis, et 20-30 en Asie.
Une introduction en bourse (IPO) est-elle prévue ?
C'est une possibilité. Nous voulons offrir de la liquidité à nos investisseurs et employés, donc une IPO pourrait faire sens. Potentiellement en 2026. En attendant, notre entreprise n'a pas besoin de capitaux, donc nous étudierons toutes les options, y compris des modèles d'actions tokenisées.
Avant d’investir dans un produit, l’investisseur doit comprendre entièrement les risques et consulter ses propres conseillers juridiques, fiscaux, financiers et comptables.

