La tokenisation s’empare avec fracas du marché actions
Une accélération que peu avaient imaginée est en train de se dérouler dans la finance. En tête de file, Robinhood a annoncé l'arrivée d'actions tokenisées sur sa plateforme européenne avec comme objectif à court terme de les rendre non-custodial. Kraken et Gemini sont également en embuscade.
La frontière entre la finance traditionnelle et la blockchain vient de s’effriter un peu plus. À Cannes lors de la grande conférence Ethereum (EthCC), Robinhood a dévoilé un projet qui ambitionne de transformer radicalement la manière d’acheter et de détenir des actions. Le groupe californien, connu pour avoir démocratisé le trading sans commission, passe désormais à l’étape suivante : la tokenisation des titres financiers.
L’idée est simple : prendre des actions classiques, comme Apple, Nvidia ou Tesla, et les convertir en tokens inscrits sur une blockchain. Concrètement, un investisseur pourra acquérir ces titres 24 heures sur 24 (et 5 jours sur 7). Mais surtout : d’ici la fin de l’année il pourra les transférer dans son propre wallet comme s’il s’agissait d’un stablecoin, ou les utiliser comme garantie pour emprunter.
“C’est une approche réellement révolutionnaire qui va bouleverser l’ensemble du secteur du brokerage”, explique Johann Kerbat, en charge de la stratégie crypto de Robinhood, dans un entretien exclusif à The Big Whale.
Cette vision rompt avec le fonctionnement traditionnel où l’investisseur est prisonnier de son courtier et de processus parfois archaïques.
Robinhood revendique avoir tout conçu en interne, du moteur de tokenisation jusqu’à l’audit des smart contracts, avec un lancement initial sur Arbitrum avant le déploiement d’un Layer 2 propriétaire qui arrivera plus tard en 2025.
Le choix d’une infrastructure blockchain n’est pas anodin. Aux États-Unis comme en Europe, transférer des actions d’un intermédiaire à un autre reste un parcours semé d’embûches, où les délais peuvent s’étirer sur plusieurs semaines et les erreurs de traitement sont fréquentes. Avec cette nouvelle architecture, Robinhood promet qu’un transfert prendra quelques secondes, sans perte d’information.
La plateforme annonce le lancement immédiat d’environ 200 actions tokenisées, avec l’objectif d’en proposer plusieurs milliers d’ici la fin de l’année, avec possiblement des actions européennes et asiatiques.
Au-delà de la simple détention, c’est toute la mécanique du marché qui se trouve reconfigurée.
Les tokens seront accessibles à toute heure, indépendamment des horaires des places boursières. Ils pourront circuler entre plateformes, être fractionnés, ou intégrés à des services de finance décentralisée (DeFi). Robinhood explique avoir bâti ce système sous licence MiFID obtenue en Lituanie et passeportée dans l’ensemble de l’Union européenne, un cadre qui permettra de répondre aux exigences réglementaires locales.
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L’annonce intervient alors que d’autres acteurs, comme Kraken, se positionnent aussi sur le créneau des actions tokenisées. Kraken a choisi de s’appuyer sur Backed Finance (via son service xStocks) pour proposer des actions américaines sous forme de tokens, également accessibles depuis des wallets personnels et interopérables avec la finance décentralisée sur Solana. De son côté, Gemini s’appuie sur Dinari, un courtier enregistré aux US.
Robinhood fait quant à lui le pari d’une solution 100 % maison, estimant que la maîtrise complète de la technologie est la condition pour intégrer les spécificités des marchés actions, comme les splits ou les dividendes.
La société affiche une ambition claire : rendre le marché actions aussi simple et fluide que l’achat de stablecoins, en supprimant les barrières horaires, les frais multiples et les contraintes de garde. Dans cette logique, elle prévoit aussi de permettre à terme d’utiliser ces titres comme garantie pour des crédits, ou de les intégrer à des contrats perpétuels lancés sur sa plateforme.
Reste maintenant à savoir si l’adoption suivra.
En 2018, Robinhood avait déjà surpris en se lançant dans le trading de cryptomonnaies. Sept ans plus tard, la crypto représente près de 30 % de ses revenus. En migrant les actions sur la blockchain, l’entreprise parie qu’elle peut reproduire ce mouvement de bascule. Elle ouvre ainsi une étape décisive : celle où les titres financiers, autrefois confinés aux systèmes fermés de la finance traditionnelle, deviennent des actifs digitaux, liquides et programmables.
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Avant d’investir dans un produit, l’investisseur doit comprendre entièrement les risques et consulter ses propres conseillers juridiques, fiscaux, financiers et comptables.
