Sharplink, le bras armé de Consensys et Linea

En quelques semaines, Sharplink s’est imposé comme l’un des principaux véhicules d’investissement en ETH cotés en Bourse. Derrière cette montée en puissance, une stratégie orchestrée par Consensys pour renforcer l’écosystème Ethereum et Linea.
C’est une trajectoire qui n’a rien d’anodin. En quelques semaines, Sharplink Gaming, jusqu’alors une société américaine spécialisée dans l’affiliation pour le secteur des paris sportifs, s’est métamorphosée en véhicule financier centré sur Ethereum.
Sous la houlette de Joseph Lubin, cofondateur d’Ethereum et patron de Consensys, la firme a adopté l’ether (ETH) comme actif de réserve principal, au point de devenir l’une des plus grandes entreprises cotées détentrices du token (devant la Fondation Ethereum mais derrière Bitmine).
Une stratégie qui rappelle celle amorcée par Michael Saylor avec le bitcoin en 2020, mais transposée ici à l’univers d’Ethereum.
Le tournant s’est amorcé fin mai, lorsque Sharplink a annoncé son intention de convertir sa trésorerie en ETH, tout en lançant un vaste programme d’émission d’actions pour financer ces acquisitions. Depuis, l’entreprise a levé plus d’un milliard de dollars sur les marchés, notamment via un placement privé de 425 millions de dollars mené par Consensys.
Le 28 juillet, elle détenait 438 000 ETH, pour une valeur estimée à 1,7 milliard de dollars. En parallèle, la société exploite des validateurs et a déjà généré plus de 567 ETH en staking (plus de 2 millions de dollars).
Son “ETH Concentration”, un indicateur interne qui mesure le nombre d’ETH par lot de 1000 actions, est passé de 2,3 à plus de 3,06 en un mois et demi, soit une hausse de 53 %.
Le “Strategy” d’Ethereum ?
Joseph Lubin a pris la présidence du conseil d’administration et assume publiquement la volonté de faire de Sharplink un catalyseur de l’adoption institutionnelle d’Ethereum. Inspiré par Strategy (ex-MicroStrategy), le cofondateur d’Ethereum envisage déjà des instruments de dette à long terme pour accompagner les levées de fonds en actions : obligations à faible taux, equity convertible, mais sans prise de risque excessive, affirme-t-il.
L’action Strategy s’est apprécié de 38 % depuis le début de l’année (et de plus de 3 000 % depuis le début de son programme d’achat de bitcoins en 2020).
Mais la stratégie va bien au-delà de l’accumulation. Sharplink se positionne aussi comme un relais dans un contexte favorable à Ethereum, qui souffrait d’une manque d’influence dans les sphères institutionnelles.
>> Ethereum : vers un vrai retournement de cycle ?
Vendredi, l’entreprise a annoncé le recrutement de Joseph Chalom comme co-CEO, jusque-là responsable crypto pour le leader mondial de la gestion d'actifs BlackRock. Un transfuge qui devrait l’aider dans cette mission.
Joseph Lubin a salué l’adoption récente du GENIUS Act, texte voté sous l’administration Trump, qui établit un cadre réglementaire fédéral pour les actifs numériques aux États-Unis. Il y voit la fin d’une ère d’incertitude réglementaire et une opportunité d’accélérer l’adoption d’Ethereum comme socle technologique pour la finance numérique.
En tant que société cotée et conforme, Sharplink sert ainsi de vitrine à une version institutionnalisée de l’écosystème Ethereum, susceptible de séduire les investisseurs classiques.
En arrière-plan, c’est une nouvelle forme de “proxy Ethereum” qui se dessine. Là où les ETF spot peinent encore à canaliser la demande des investisseurs, et où les produits dérivés introduisent un niveau d’abstraction souvent mal compris, Sharplink propose une exposition directe, lisible et auditable à l’actif natif d’Ethereum.
Pour certains investisseurs, cela pourrait représenter une alternative crédible à l’achat en direct de tokens, à condition d’accepter la dilution induite par les émissions d’actions (lire notre rapport consacré aux Bitcoin Treasury Companies pour tout comprendre au modèle économique et aux risques de ces entreprises).
Reste à savoir si cette stratégie trouvera son équilibre dans un marché volatil et saturé de narratifs. La montée rapide du cours de l’action SBET (multiplié par six depuis fin mai) a connu un contrecoup brutal mi-juillet, avec une chute de 69 % consécutive à l’enregistrement de parts détenues par les investisseurs initiaux.
Joseph Lubin s’est voulu rassurant, expliquant qu’il s’agissait d’une procédure standard, nécessaire pour accueillir de nouveaux entrants. Il affirme que de nombreux investisseurs sont encore sur la touche et que d’importants flux d’ETH devraient encore rejoindre la trésorerie de l’entreprise.
Sharplink reste un pari singulier dans le paysage des Crypto Treasury Companies en raison de sa proximité avec Linea, une blockchain de seconde couche (layer 2) d’Ethereum permettant de démultiplier sa scalabilité tout en bénéficiant de la grande sécurité de la blockchain Ethereum (layer 1).
Consensys est l’entreprise qui a conçu Linea et qui en assure la plus grande partie de la gouvernance. Selon nos informations, de nombreux ETH détenus par Sharplink devraient être déposés dans Linea afin d’obtenir du rendement dessus et apporter une grande liquidité dans Linea.
>> The Ethereum Briefing - Tout ce qu’il faut savoir sur Ehereum au 1er semestre 2025
Avant d’investir dans un produit, l’investisseur doit comprendre entièrement les risques et consulter ses propres conseillers juridiques, fiscaux, financiers et comptables.

